Royal Philatélie Hesbignonne

 

En marges des « Chiffres sur lion »…
                                                             

   un article de Michel Feron   

      La série communément appelée « Chiffres sur lion » ne connaît toujours pas la grande vogue chez les philatélistes belges, et il est fort rare de voir dans les cadres d’une exposition une collection spécialisée en ce domaine… Pourtant, cette série ne manque ni d’intérêt ni de variété !

      Elle en effet connu deux types d’impression : la taille-douce (n° COB 841) et la typographie (toutes les autres valeurs), deux formats différents, trois sortes de papier, diverses dentelures, et elle offre même aux collectionneurs de haut niveau une rareté (n° COB 1370PB). Ajoutons à cela quelques surcharges, des timbres partiellement non dentelés (extraits de carnets), des préoblitérations, des surcharges-préoblitérations, des timbres en rouleaux, quelques timbres de service, de nombreux entiers postaux : voilà certes de quoi réaliser une étude des plus fouillées ! De plus, à part quelques cas, tous ces timbres sont d’un prix très abordable, tant en neufs qu’en oblitérés ou même sur plis… Par ailleurs, elle a survécu à de nombreux changements de tarifs, ce qui permet de passionnantes recherches en timbres sur lettres !

      Le dessin de cette série, simple et attrayant, est dû à William Goffin, un artiste belge fort apprécié de la Poste à cette époque, puisqu’on lui doit aussi, entre autres, le dessin des séries « Breendonk » (n° COB 860/862), « Châteaux » (n° COB 868/75) et même « UPU » (n° COB 880/91). La gravure du 20c en taille-douce est l’œuvre de Léon Janssens, un des excellents graveurs de l’époque. (Notons en passant que notre COB lui attribue également la gravure des timbres imprimés en typographie… La chose nous étonnerait très fort, car Janssens était un spécialiste de la taille-douce !)

      Peu de philatélistes savent que les feuilles de cette série ont connu pas moins de quatre présentations différentes. Le 20c gravé a été imprimé en feuilles de 50, comportant un numéro de planche (de 1 à 4) et un coin daté. Les valeurs en typographie ont d’abord été imprimées en d’immenses feuilles de 400 exemplaires, répartis en quatre panneaux de 100 timbres. Enfin, on est revenu à des dimensions plus modestes : des feuilles de 100 en dix rangées de 10 exemplaires. Le 1F grand format rose a été imprimé en feuilles de 50, tandis que les timbres grand format destinés à la confection de rouleaux le furent en bandes continues d’une largeur de 10 timbres. Ces bandes continues furent d’ailleurs ensuite débitées en « feuilles » de 60 ou 120 exemplaires.

      Nous voudrions aujourd’hui nous pencher sur le cas des feuilles de 4 panneaux de 100 timbres. Ces feuilles comportaient bien entendu des interpanneaux tant horizontaux que verticaux. Diverses inscriptions se retrouvent tant dans les marges que sur les interpanneaux, et c’est celles-ci que nous voulons évoquer ici…

chiffres 1      


interpanneau horizontal du n° COB 1173

chiffres 2

interpanneau vertical du n° COB 1173

      Ainsi qu’on le voit, chaque panneau de 100 timbres est entouré d’un filet d’encadrement, dont le rôle principal était de protéger les arêtes des clichés extérieures, arêtes qui souffrent assez atrocement lors d’une impression en typographie sur rotative. Tous ces timbres étant monochromes, les filets d’encadrement sont bien entendu de la même couleur que les timbres…
     
      Les panneaux étaient disposés en deux rangées de deux panneaux. La dentelure était continue entre panneaux dans le sens vertical, mais s’interrompait lors de l’interpanneau horizontal. Cette disposition en deux rangées créait, au centre de la feuille, quatre timbres séparés par des interpanneaux horizontaux et verticaux : on obtenait ainsi ce que les (rares) spécialistes de l’époque appelaient des « croix centrales ».

               chiffres 3

chiffres 4

 

      Très peu de ces « croix centrales » ont été conservées : la grande taille des feuilles amenait les guichetiers à les plier en quatre pour pouvoir les héberger dans leurs classeurs à timbres. La plupart des interpanneaux et des croix présentent donc des plis… Souvent même, les guichetiers débitaient les feuilles en panneaux séparés avant que de les ranger dans le classeur ad hoc. Nous connaissons une spécialiste de l’émission qui recherche depuis des dizaines d’années une « croix centrale » du n° COB 1173A, sans le moindre succès ! (Signalons cependant que les bureaux temporaires et/ou de prévente disposaient généralement de feuilles complètes qu’ils pouvaient vendre en l’état… D’où un petit jeu folklorique qui eut son heure de gloire : on achetait une feuille de 400 timbres de 2c ou 3c, pour la modeste somme de 8 ou 12 francs, et on demandait au préposé du bureau d’en oblitérer proprement tous les timbres !)

      Venons-en maintenant aux inscriptions marginales que l’on pouvait trouver sur ces fameuses feuilles :

                Les numéros de ligne : les lignes de chaque panneau étaient numérotées à gauche de 1 à 10, par d’assez grands chiffres bien sûr imprimés dans la couleur du timbre lui-même. Ces numéros se trouvaient donc dans la marge gauche et dans les interpanneaux horizontaux. Il arrivait cependant que certaines feuilles fussent dépourvues de ces numéros, ainsi que le montre l’exemple du 3c.

 

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          les croix de repère : ces petites croix (ou fragments de croix) servaient essentiellement au réglage des herses effectuant la dentelure. On les trouve près des coins des panneaux. On peut même trouver deux croix face à face sur un même interpanneau horizontal !

    

chiffre 9 chiffre 10

chiffre 11

 

chiffres 12

 

     Les marques de contrôleur : ces marques sont composées d’un nombre inscrit dans un cercle. Ils sont apposés à l’encre noire après l’impression des feuilles.

chiffre 15

   

chffre 13 chiffre 14

 

 

            Les millésimes et numéros de feuille : Ils sont aussi appliqués à l’encre noire après l’impression des feuilles : ces empreintes comportent en général les lettres « TB » accompagnées du millésime et du numéro de la feuille.

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               Enfin, on trouve sur la plupart des feuilles un trou circulaire réalisé à l’emporte-pièce. On suppose qu’il s’agit là d’une marque de contrôle…

chiffre 18

     
      Signalons que les timbres préoblitérés portaient dans la marge des indications sur les modalités de leur emploi. Ces indications étaient imprimées en noir en même temps que la préoblitération. Il arrive qu’un décalage lors de l’impression fasse porter une partie de ces textes sur les timbres eux-mêmes. De tels cas sont cependant très rares !

      Voilà de quoi faire passer à tout philatéliste dévoué à sa passion de nombreuses soirées de recherche et de classement. Il ne faudrait pas non plus négliger les variétés que l’on peut trouver sur certaines valeurs : le COB en donne les principales, mais on peut en trouver d’autres !

      Les timbres sur pli (au tarif exact, bien entendu) ne posent en général pas trop de problèmes, surtout pour les valeurs ayant correspondu au tarif des imprimés. Deux exceptions notables : les timbres à 2c et 3c ! Ces timbre correspondaient pourtant à un tarif bien précis : celui des journaux expédiés sous bande adressée par l’éditeur mais livrés en même temps que les exemplaires destinés aux abonnés. Autant dire qu’il s’agissait d’un cas rarissime…